Monsieur le Premier Ministre du Québec, François Legault,
Voilà maintenant trois semaines que votre gouvernement ne ménage pas ses efforts pour tenter de contenir les effets que pourrait avoir sur le Québec la crise sanitaire mondiale de la COVID-19. Les actions que vous posez sont vigoureuses, concrètes et nécessaires afin de protéger un nombre malheureusement grandissant de personnes vulnérables. Nous vous en remercions grandement. Mais si nous souhaitons réellement être porteurs d’espoir face à cette crise, il est primordial d’en faire davantage pour soutenir les chômeurs forcés, les personnes seules devenues soudainement plus seules que jamais, les familles rendues trop vite prisonnières d’un quotidien insoutenable ou les milliers de personnes n’ayant d’autre choix que de faire la file devant un organisme communautaire pour obtenir un panier de nourriture.
Vos allocutions quotidiennes font régulièrement référence aux travailleurs du milieu de la santé et des services sociaux, nos « anges gardiens », dont les efforts viennent tout juste d’être reconnus par une enveloppe budgétaire supplémentaire de 287 millions $. Leur travail est essentiel et admirable, mais d’autres anges gardiens sont à leurs côtés, partenaires au quotidien de cette gestion de crise. Ce sont les actrices et acteurs des organismes communautaires. Trop fréquemment relégué au second plan, et ce, alors qu’il rejoint mieux que quiconque les personnes les plus souvent oubliées, ce réseau communautaire est plus important et indispensable que jamais en ces temps difficiles. À notre avis, Monsieur le Premier Ministre, ce réseau d’acteurs indispensables, qui représente depuis toujours une des composantes majeures de notre filet de protection sociale, n’est pas reconnu et soutenu à la hauteur des miracles qu’il réalise quotidiennement auprès de la population, partout sur notre territoire.
Le problème ici ne réside pas dans les mesures mises en place pour freiner la propagation du virus. Au contraire, elles ont toutes leur pertinence et viennent avec diverses compensations pour en réduire les effets négatifs, notamment auprès des individus et des entreprises. Il y a maintenant deux semaines, vous avez indiqué votre volonté de mettre en place ce même genre de compensation pour ceux et celles qui tiennent à bout de bras notre filet social collectif. Et à ce jour, les mesures que vous avez mises en place pour le milieu communautaire équivalent à des investissements de 14,5 millions $, notamment pour les banques alimentaires et les femmes victimes de violence.
Notre expertise et notre expérience sur le terrain, ainsi que les témoignages d’organismes et partenaires communautaires nous forcent à constater que ces investissements ne suffiront pas. Compte tenu des besoins immenses, nouveaux et imprévus provoqués par la crise, et considérant les 2,5 milliards $ récemment annoncés par votre gouvernement pour soutenir l’économie québécoise, les 10 millions $ ajoutés mercredi au programme Soutien à l’action bénévole sont insuffisants pour traduire les efforts consentis par des milliers de bénévoles et d’employés d’organismes communautaires. Car la crise que nous vivons tous en lien avec la COVID-19 n’est pas qu’une crise sanitaire, c’est aussi une crise humaine.
Dans ce contexte, nous ne pouvons nous priver des ressources que représentent les acteurs branchés au quotidien sur les enjeux, les besoins et les défis de nos communautés. Nous sommes inquiets et invoquons votre écoute, votre soutien et votre aide afin de structurer une réponse vigoureuse à la hauteur de cette crise sans précédent.
Le 18 mars, Centraide Québec, Chaudière-Appalaches et Bas-Saint-Laurent a mis sur pied un fonds d’urgence pour venir en aide aux organismes communautaires et aux personnes en difficulté qu’ils rejoignent chaque jour, particulièrement depuis le début de la crise. Malgré le contexte d’incertitude économique, citoyens, travailleurs et corporations ont répondu présents à cet appel à la solidarité. Nous vous implorons, Monsieur le Premier Ministre, de joindre le mouvement avec la force et la vigueur qui sont les vôtres depuis le premier jour de la crise.
Nous vous prions de faire du soutien structurant aux organismes communautaires une priorité de la crise à laquelle nous sommes collectivement confrontés. Il s’agit ici de services essentiels. Et à ce titre, nous vous tendons la main.
Marc De Koninck
Président du conseil d’administration
Centraide Québec, Chaudière-Appalaches et Bas-Saint-Laurent
Bruno Marchand
Président-directeur général
Centraide Québec, Chaudière-Appalaches et Bas-Saint-Laurent