Souffler ses 75 bougies, sans une seule ride!
Le 9 février est une date toute particulière pour Centraide Québec et Chaudière-Appalaches. Notre organisation philanthropique a vu le jour en février 1945. Ce n’est pas tous les jours qu’on célèbre son 75e anniversaire! Pour souligner ce moment important, nous avons réuni trois de nos dirigeants qui ont mené notre organisation à bon port au cours des trente dernières années. Discussion avec Denis Rhéaume, Pierre Métivier et Bruno Marchand, trois hommes engagés qui ont Centraide tatoué sur le cœur.
Une franche camaraderie s’installe entre les trois protagonistes réunis pour l’occasion. Même si leurs destinées ne se sont qu’entrecroisées, ces hommes ont toujours eu ce même désir de veiller à ce que notre communauté soit plus juste, plus équitable, une communauté tissée serrée qui lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. C’est d’ailleurs la raison d’être de Centraide. Ils ont tour à tour fait grandir Centraide Québec et Chaudière-Appalaches, à leur manière, avec leurs convictions profondes. C’est ce qui les unit encore aujourd’hui.
Les souvenirs de Denis Rhéaume
À l’aube de ses 75 ans, Denis Rhéaume a le même âge que l’organisation philanthropique. Même s’il le dit en rigolant, on sent bien toute la fierté qui l’habite lorsqu’il en parle. Il a fait son entrée comme directeur général en 1986, alors que Centraide avait pignon sur la 46e Rue à Charlesbourg.
Pendant les huit années où il a été en poste, il s’est toujours senti privilégié de mettre son expertise au service de la cause. « Je me sentais comme un chef d’orchestre. Il y avait une telle collaboration entre les employés, un bel esprit d’équipe. On travaillait mais on n’avait pas l’impression de travailler tellement c’était agréable. L’équipe était très engagée, avec de belles idées. C’était un privilège de faire partie d’une telle organisation. »
Il se rappelle aussi avec bonheur tous ces intervenants communautaires qui œuvraient au sein des organismes soutenus par Centraide. « Ils épousaient leur cause, c’était vital pour eux, comme une vocation. C’était extrêmement motivant de les côtoyer. » Il porte ce même regard bienveillant sur les membres du conseil d’administration de l’époque. « La qualité des bénévoles qu’on avait était exceptionnelle. À titre d’exemple, les sept membres du comité exécutif du temps étaient présidentiables si bien que, tour à tour, ils ont assumé avec un engagement remarquable cette importante responsabilité de président du Conseil d’administration de Centraide. »
Outiller les bénévoles et faire connaître Centraide
Sous son égide, un programme de formation a été mis sur pied pour mieux encadrer les représentants délégués, ces bénévoles qui viennent nous prêter main-forte lors de notre campagne. Denis Rhéaume a aussi misé sur la création d’un département de communication pour mieux faire connaître Centraide, une stratégie qui a permis d’atteindre encore plus de donateurs. Les dons recueillis ont doublé de 1986 à 1994, pour atteindre quatre millions et demi de dollars.
Le gestionnaire s’est aussi fait un point d’honneur à mettre de l’avant le don solidaire, un concept si précieux à ses yeux et qui prévaut encore aujourd’hui. Centraide procède à une analyse rigoureuse des besoins réels des organismes communautaires, sans égard au fait qu’une cause ne soit pas la saveur du mois, comme la prostitution ou la maladie mentale par exemple.
Denis Rhéaume a toujours veillé à protéger cette façon de faire propre à Centraide. « La longévité de notre organisation démontre bien l’efficacité du don solidaire. En plus, ça garantit aux donateurs que les dons sont bien investis. »
Pierre Métivier prend le relais
Pierre Métivier est le digne successeur de Denis Rhéaume en 1994. À son arrivée en poste, il a de grandes ambitions. « Je disais à la blague que je m’en venais chez Centraide pour fermer la shop, pour ne plus qu’il y ait de pauvreté! Évidemment, ça ne s’est pas concrétisé. »
Son approche en est une de terrain. Centraide a mis sur pied des assemblées de cuisine dans différents quartiers, afin de lutter contre la pauvreté de façon très locale. Il aimait bien consulter la population pour mettre de l’avant des solutions, comme cette immense boîte à suggestions à Place Laurier. « Les suggestions recueillies nous aidaient dans notre analyse sociale, tout en nous permettant de recruter de nouveaux bénévoles dédiés à la cause. »
Dons majeurs et dons planifiés
Vers la fin des années 90, Pierre Métivier a instauré des programmes innovants pour aller chercher de nouveaux donateurs dédiés à la cause. Le programme des dons planifiés en est un bel exemple. Dons par testament, assurance-vie, REER, dons de biens meubles ou immeubles, fonds dédié à un être cher, ce volet était presque inexistant au Québec. En homme visionnaire, il s’est inspiré des meilleures pratiques qui se faisaient ailleurs.
C’est aussi lui qui a mis sur pied le programme des donateurs majeurs, avec la précieuse collaboration de l’homme d’affaires Yvon Charest. Ce programme s’adresse à ceux qui font un don de 2 500$ et plus. Le Cercle des donateurs majeurs ne cesse de grandir d’année en année. À ce jour, il regroupe près de 600 personnes qui s’engagent de manière exceptionnelle envers notre communauté. Les initiatives mises de l’avant par Pierre Métivier sont encore porteuses aujourd’hui.
Solliciter l’expertise des gens d’affaires
L’ancien dirigeant ne s’est pas contenté de solliciter financièrement les gens d’affaires de la région, il a aussi sollicité leur expertise. « Je leur ai demandé de nous aider, mais pas en donnant de l’argent, en s’impliquant dans ce qu’ils font de mieux. » Son appel à l’entraide a été entendu et il a donné lieu à de belles initiatives.
La Chambre de commerce et d’industrie de Québec a instauré le prix Affaires et engagement social remis par Centraide et SSQ Assurance a fait don de la Maison des Oblats au Pignon Bleu, un organisme soutenu par Centraide. C’est sans compter la mise en service de la ligne téléphonique 2-1-1 qui réfère les gens dans le besoin aux ressources sociocommunautaires de leur quartier. À cela s’ajoute la création de l’organisme Bénévoles d’expertise qui accompagne les OBNL à vocation sociale en matière de gouvernance et de gestion.
Centraide et le 400e de Québec
Parmi ses bons souvenirs, l’ancien directeur général se remémore avec bonheur le Grand brunch de la Solidarité organisé dans le cadre des Fêtes du 400e de Québec. C’est l’homme d’affaires Jean Leclerc qui l’avait approché pour mettre Centraide dans le coup. Il voulait démontrer que les gens de Québec étaient très solidaires et qu’il y avait beaucoup d’entraide.
L’événement a réuni 1500 personnes au Centre des Congrès et culminait avec un spectacle du Cirque du Soleil. C’est l’un des plus grands rassemblements de bénévoles jamais vus à Québec, et Centraide y était intimement lié. « Que Centraide ait été choisi pour organiser ce grand rassemblement à Québec a été un grand honneur pour moi. Que tous les bénévoles qui gravitent autour de Centraide soient traités comme des rois, sans que ça ne leur coûte rien, m’a rendu très fier. »
Des dons toujours en hausse
Une autre belle fierté pour Pierre Métivier, c’est la hausse constante des résultats de campagnes. Alors qu’il a été à la tête de Centraide Québec et Chaudière-Appalaches pendant 19 ans, les dons amassés sont passés de quatre millions en 1994 à 13 millions en 2013. Il estime que plusieurs facteurs expliquent cet exploit. « Nous avons investi l’argent des donateurs à la bonne place et nous leur avons fait comprendre à quoi servent leurs dons. »
Bien plus qu’un simple bailleur de fonds, Centraide a aussi mis de l’avant tout le travail effectué en amont dans le volet Développement social. En travaillant étroitement avec les organismes communautaires soutenus et en leur assurant un financement triennal, Pierre Métivier et son équipe en ont fait des partenaires de premier plan. D’ailleurs, plusieurs documents de réflexion et d’analyse sociale ont été rédigés pour donner un état des lieux de notre communauté.
L’arrivée de Bruno Marchand et du numérique
Quand Pierre Métivier a quitté en 2013, c’est Bruno Marchand qui a repris le flambeau. Il avait déjà une bonne connaissance de l’organisation puisqu’il a été un bénévole dévoué pendant quatorze ans. Il a même siégé comme président du conseil d’administration de Centraide Québec et Chaudière-Appalaches.
« Avant d’y travailler, j’y croyais fermement. Le concept même de Centraide est une richesse extraordinaire. » De son propre aveu, lorsqu’il a pris les rênes de l’organisation, elle était en excellente santé financière. « Quand je suis arrivé, c’était facile. Centraide avait déjà acquis une notoriété et nous avions des bénévoles indéfectibles. »
Malgré ce gage de réussite, une série de changements ont été entamés pour être en phase avec les attentes des donateurs, les sollicitations multiples et l’avènement du numérique, notamment. Infolettres numériques, émissions de reçus électroniques, création du programme Clicdon pour faciliter la sollicitation dans les campagnes en milieu de travail, les façons de faire ont été actualisées. « Je salue l’audace du CA. Nous avons eu le courage de faire ces changements quand tout allait bien. »
Employés, intervenants et bénévoles dévoués
Alors que Bruno Marchand entame sa septième année comme PDG, il est encore touché de voir tant de gens s’impliquer pour la cause, que ce soit des employés, des intervenants communautaires ou des bénévoles. Il a en tête tous ces gens qui ont porté à bout de bras des projets et de nouveaux organismes communautaires. Centraide est souvent l’un des premiers bailleurs de fonds qui a cru en la pertinence de ces nouvelles initiatives.
Il y aussi tous ces bénévoles de longue date qui s’impliquent et qui ne comptent pas leur temps. « Je suis touché de pouvoir marcher aux côtés de ces grandes personnes, quel privilège. Ce sont des mentors, des exemples d’humanité. C’est là qu’on se rend compte qu’on a encore des croûtes à manger. »
Bruno Marchand et son équipe se font un devoir de bonifier l’expérience des bénévoles impliqués. « Nos bénévoles nous demandent d’avoir une approche plus proactive avec eux. Nous avons donc amélioré le soutien que nous leur offrons, pour faire de leur expérience quelque chose de riche, et nous allons continuer de perfectionner notre approche avec eux. »
Des campagnes porteuses
L’actuel PDG est plus que satisfait de la croissance constante des résultats de campagnes de Centraide Québec et Chaudière-Appalaches. L’an dernier, c’est 15 millions de dollars qui ont été amassés, une somme record qui a été remise à plus de 200 organismes communautaires.
Bruno Marchand fait valoir l’importance de maintenir une organisation efficiente. . « Nous avons une obligation morale à faire le maximum pour les organismes communautaires que nous soutenons, sinon il y a des gens qui ne mangent pas. Si on amasse moins d’argent, il y a des gens qui n’auront pas de soutien. »
Défis de l’organisation
Plusieurs défis attendent l’organisation, et la multiplication des fondations en fait partie. Entreprises privées, écoles, institutions publiques, hôpitaux, la plupart des organisations ont leur propre fondation. Bruno Marchand en est bien conscient et compte tout mettre en œuvre pour que Centraide puisse tirer son épingle du jeu, avec le don solidaire qui est là pour rester.
« C’est pertinent de ne pas financer seulement les causes qui sont populaires, malgré les tendances philanthropiques où on voit de plus en plus de gens choisir leur cause. Si chaque cause avait sa fondation, ce serait impossible pour les donateurs d’y voir clair et de faire les bons choix. En ce sens, le don solidaire est la plus grande plus-value de Centraide. »
En matière de développement social, Centraide doit être un acteur de premier plan en matière de lutte à la pauvreté et à l’exclusion sociale. « Les gens s’attendent à ce que Centraide ait un plus grand rôle dans l’opinion publique et nous voulons être encore plus présents comme acteur social. » Il est convaincu que ça passe par des partenariats avec les organismes communautaires et les acteurs du milieu.
75 ans et toujours de son temps
Malgré les défis, Bruno Marchand, est persuadé que l’organisation restera actuelle. « Centraide évolue mais demeure enraciné dans sa communauté, et c’est pour ça que nous sommes restés d’actualité. Nous sommes en cohérence avec notre culture, notre région et notre époque. »
Les anciens gestionnaires abondent dans le même sens. « Centraide est essentiel. Avec son approche globale, il va demeurer encore longtemps une référence », parole de Denis Rhéaume. Quant à Pierre Métivier, la pertinence de l’organisation ne fait aucun doute. « Une communauté en santé, c’est une communauté qui s’occupe des siens, et ce sera encore comme ça dans quinze ou même vingt ans. Même si des gens ont l’impression qu’ils peuvent donner à n’importe qui et à n’importe quelle cause, c’est encore en donnant à Centraide qu’on peut couvrir l’ensemble des besoins. »
Le mot de la fin appartient à Bruno Marchand. « Je souhaite que Centraide ait la vie la plus longue possible. Les besoins sont trop grands pour ne plus exister. Centraide, ce n’est pas une question d’individus, c’est une question de communauté. Le NOUS est plus important que le JE. »
Un NOUS qui englobe des milliers de bénévoles, de donateurs, de partenaires et d’employés qui, au fil de ses 75 ans d’histoire, font de Centraide Québec et Chaudière-Appalaches une organisation tournée vers l’avenir, avec le cœur à la bonne place.